Jeudi 9 mai 2018, j’ai écourté ma virée en Provence pour rentrer à Lyon voir Roger Waters, ex-bassiste des Pink Floyd, à la halle Tony-Garnier. Je me suis demandé si j’avais fait le bon choix, sachant que le prix de la place (80 euros sur Vente Privée pour une place en fosse or) équivalait à celui d’une nuit dans un beau B&B dans le Lubéron. Bref.

Lyon, première date de la tournée française de Roger Waters

Sur les coups de 19 heures, je prends donc place avec ma bière, mon sandwich et mon chéri assise dans la fosse. A nos côtés, la foule est éclectique. J’avais un peu peur de ne me retrouver qu’entourée de vieux nostalgiques bedonnants, affublés d’un tee-shirt « Dark Side Of The Moon ». Il y en a, mais pas que. Des jeunes couples, des ados, des couples d’âge moyen… tous venus applaudir celui que de nombreux fans de Pink Floyd considèrent comme un traître, celui qui a tyrannisé les autres membres du groupe pour finalement le quitter en 1985 (une belle année, pourtant, puisque celle de ma naissance). En 2018, c’est dans le cadre de sa tournée « Us + Them », en référence au titre éponyme des Pink Floyd, que Waters se produit à Lyon. La première date des quatre concerts prévus en France (*).

20 heures. L’écran géant (mais vraiment géant) s’allume enfin. Les instruments (dont d’innombrables guitares) sont installés. La foule s’attend à voir arriver Roger Waters. Il n’en est rien. Pendant une vingtaine de minutes, l’écran affiche une femme voilée, de dos, admirant la mer. Pour seul fond musical, les bruits des vagues et, parfois, la corne d’un bateau. Le public s’interroge. Roger Waters est-il encore dans son hôtel ? Est-il malade ? va-t-il tout simplement venir ?

Le concert a débuté sur ce plan pendant une vingtaine de minutes.

Une première partie cosmique et efficace

Finalement, le paysage laisse la place à une sorte d’explosion. Roger Waters entre en scène, sec et musculeux, et ses musiciens – exceptionnels – entament Breathe avant d’enchaîner les grands succès des Pink Floyd : One of These Days, Time, ou encore un Welcome to the Machine, titre au cours de laquelle la tension et la colère de Waters montent d’un cran. Pendant cette première partie, Waters, qui envoie encore vocalement, laisse la vedette à ses deux chanteuses dans son très cosmique Great Gide in the Sky. Il raconte aussi l’histoire d’une migrante (la femme du début du concert), qui était visiblement une danseuse talentueuse dans un pays qui semblerait être la Syrie. Waters tire droit au cœur et vise juste.

De jeunes Lyonnais font le mur sur scène

Il termine cette première partie, hautement efficace, avec l’incontournable Another Brick in the Wall, pendant lequel de jeunes Lyonnais entrent en scène encagoulés, avant se libérer de leur statut de prisonnier, dévoilant un tee-shirt sur lequel il est inscrit « Resist ». Une fin de première partie qui laisse entrevoir ce que sera la seconde.

A savoir une violente charge contre la société capitaliste. Deux grandes toiles descendent au centre de la fosse, sur lesquelles sont projetées les images de la Battersea Power Station, usine londonienne qui fut le décor de la pochette de l’album Animals. S’ensuit une demi-heure dans laquelle Waters fustige la soif de l’argent avec Dogs, la bourgeoisie avec Pigs, chanson au cours de laquelle le célèbre porc rose flotte au-dessus de la salle.

Un Roger Waters engagé et virulent

De nombreux dirigeants, morts ou actuels, en prennent ensuite pour leur grade :  Staline, Mao, Bush, les Le Pen, Theresa May, Bachar, Erdogan ou encore Netanyahu. Mais c’est Trump, tantôt grimé en prostituée, tantôt recouvert du mot « Charade », qui récolte toute la fureur de Waters, virulent comme jamais du haut de ses presque 75 ans. Pas toujours subtile, mais puissant et efficace.

Waters a réussi son coup : il a sonné son public. Il termine par Us and Them, Dark Side of The Moon et Confortably Numb, sous de grands lasers formant le triangle de la célèbre pochette de Dark Side of The Moon.

Au bout de presque trois heures de concert, je ne me pose plus la question. J’ai bien fait d’écourter mon week-end dans le sud. Je me suis pris une bonne claque artistique. Roger Waters a été époustouflant, fidèle à sa légende de génie pas très sympa.

(*) Roger Waters se produira à l’U Arena de Nanterre, les 8 et 9 juin et au stade Pierre-Mauroy, à Lille, le 16 juin.

Written by Audrey

Wohdrey, fondatrice du blog De Lyon en Large, pour prendre le large à Lyon... et ailleurs !

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